Le blog des Directions Techniques et de la Maîtrise d'Ouvrage

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Le Bail Réel Solidaire, solution miracle de l’accession sociale à la propriété ?

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L’accession sociale en Bail Réel Solidaire, de quoi parle-t-on ?

Il ne se passe pas une semaine sans qu’un organisme d’Hlm annonce le lancement d’un programme d’accession sociale à la propriété en Bail Réel Solidaire (BRS). Et chaque fois, quel que soit le territoire, les prix de vente annoncés des logements sont très attractifs, bien en deçà des marchés immobiliers locaux.

C’est la loi ALUR de 2014, amendée par plusieurs textes ultérieurs et notamment la loi ELAN de 2018, qui a créé le mécanisme du BRS. Transposition hexagonale de l’anglo-saxon Community Land Trust, c’est un outil de démembrement qui permet à un accédant à la propriété d’acquérir les « droits réels immobiliers » d’un logement, c’est-à-dire un droit d’usage d’une durée de 99 ans mais qui lui confère toutes les prérogatives d’un propriétaire. 

Le « foncier » reste lui porté ad vitam aeternam par un Organisme de Foncier Solidaire (OFS) créé à cet effet. L’accédant ou « preneur » paye une redevance à l’OFS pour la location du foncier. 

Le preneur doit avoir des ressources inférieures à un plafond réglementaire et le prix d’acquisition est plafonné. Il peut revendre son bien au prix d’origine avec une plus-value encadrée, et l’acquéreur suivant devra avoir lui aussi des ressources plafonnées. Ce mécanisme permet de minorer fortement le prix d’acquisition pour le preneur. Il garantit une affectation sociale pérenne du bien et empêche la spéculation.

Foncier Solidaire France, réseau national des OFS, a comptabilisé 5 logements livrés en BRS en 2019, près de 400 en 2021, mais il estime qu’il y en aura 11 000 en 2025 et 25 000 en projet ! On dénombre déjà près de 80 OFS, généralement créés à l’initiative de collectivités locales et/ou d’organismes d’Hlm.

Alors, le BRS est-il la solution miracle de l’accession sociale, notamment dans les zones aux marchés les plus tendus ?

Effectivement, partout où il passe, le BRS terrasse le marché privé neuf local, avec des décotes à la vente qui peuvent atteindre 30 à 40% par rapport à ce dernier. Ne citons qu’un seul exemple, celui de La Foncière de la ville de Paris, dont les 23 premiers logements en BRS de l’opération Saint-Vincent-de-Paul ont été commercialisés en 2021 à 4 906 € par m²… alors que le marché privé local dépasse les 10 000 €. 

Les organismes d’Hlm, qui constituent l’essentiel des promoteurs de ce dispositif, fournissent en outre aux preneurs les garanties de l’accession sociale. On constate par ailleurs que la souplesse du mécanisme lui permet de s’adapter à des situations et usages divers : accession sociale bien entendu, mais aussi production de logements locatifs sociaux, intervention dans les centres anciens en renouvellement urbain ou dans les copropriétés dégradées, Vente Hlm, etc.

Mécanisme idyllique donc, qui se déploie pour le moment sans contraintes et sans entrave.

Pour autant, il faut rester attentif aux limites potentielles.

Limite de financement tout d’abord. Le mécanisme s’appuie grandement sur la capacité des OFS à amortir les fonciers sur de très longues durées. Certains sont fortement capitalisés pour cela par leurs fondateurs, d’autres moins. Dans ce second cas, les OFS recourent aux prêts sur 80 ans de la Banque des territoires, sur fonds du Livret A. Cette ressource n’est pour le moment pas contrainte mais cela sera-t-il toujours le cas ? 

Limites d’utilisation ensuite. Le BRS permet de réaliser de l’accession sociale à un prix de vente au m² plafonné, celui du PSLA. Or, si le prix de ce dernier intègre l’ensemble des coûts du prix de revient (et notamment la charge foncière), le mécanisme de démembrement du BRS permet d’avoir un prix de revient supérieur au prix plafond du PSLA, l’OFS amortissant une partie des coûts au-delà du prix plafond du PSLA. 

C’est ce qui fait la force du dispositif OFS/BRS dans les zones les plus tendues où il est utilisé dans le sens de l’intérêt général par les collectivités locales et les organismes d’Hlm, mais il ne faudrait pas que le BRS permette à d’autres acteurs de produire le plus cher possible et d’augmenter le prix de revient de l’accession sociale à la propriété, en cherchant à maximiser leurs profits.

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¹ « De Lille à Anglet : un état des lieux de la dynamique des OFS », Journées du Réseau National des Organismes de Foncier Solidaires, 3 et 4 novembre 2021.
² Prêt Social de Location-Accession, un des dispositifs de financement de l’accession sociale à la propriété.

Article publié le 25/04/2022

 

Photo de l'auteur de l'article Jean-Marie Paris

Cet article a été rédigé par

Jean-Marie PARIS

Consultant-expert indépendant, formateur AFPOLS
Ex-directeur général d’OLS, 30 ans d’expérience du logement social

jmparis@cqfd.immo

Logement : quel modèle de construction et d’aménagement pour les OLS ?

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Le logement est l’un des sujets sensibles depuis de nombreux mois, qu’il s’agisse de sa qualité architecturale et technique, des publics qui l’occupent, ou encore de son mode de production.

Après une période de production de masse relativement industrialisée qui a produit le spacieux logement social des ensembles des années 70, le basculement dans la quête du plus haut niveau technique destiné à pallier les risques ultérieurs, a été progressivement développé et atteint.

L’arrivée de la RE2020 et la neutralité carbone, celle de l’objectif Zéro Artificialisation Nette des sols (ZAN) à la moitié du siècle, en sont de nouvelles preuves, auxquelles il convient d’ajouter la crise sanitaire en cours. 

Autant d’éléments qui viennent donc transformer les conditions de localisation, de production, d’équilibre des opérations, d’usages et de conception du logement.

Le logement social aura-t-il un jour sa place en centre-ville ?

Le logement social pourra difficilement continuer d’être trop éloigné des équipements publics en raison des coûts du foncier, au risque de ne pas passer la barre de la règlementation particulièrement contraignante des années à venir. 

Par ailleurs, le coût du carburant atteint ses limites pour les ménages, alors que le transport public manque là où la densité est absente. De fait, les collectivités locales sont interpellées sur leur politique de l’habitat ; mais les moyens dont elles disposent, sont-ils suffisants pour mettre en œuvre des projets plus vertueux ? 

Certes, la VEFA constitue un outil avantageux en termes de localisation, mais elle court-circuite la maîtrise d’ouvrage sociale alors que celle-ci a besoin de se renforcer en raison des nouveaux enjeux.

La densification, même raisonnée, se heurte à l’artificialisation des sols, ce qui implique un nouveau regard sur le projet urbain du PLU, une réduction des emprises au sol, mais aussi une augmentation des hauteurs en raison du coût des terrains bien situés. L’urbanisme vertical peut-il constituer une réponse en matière d’habitat, dans quelles proportions et acceptations ?

Comment concilier contraintes économiques et redimensionnement du logement ?

A nouveau, le relèvement du niveau technique du logement va peser sur les contraintes d’équilibre des opérations. Les prix de revient augmentent déjà, sans que l’on puisse imaginer compenser ces hausses par des augmentations de loyers

Dès lors, en l’absence d’aides circonstanciées, le recours aux fonds propres risque de pénaliser les OLS plus faibles. Bien sûr, le mouvement, actuellement esquissé de réutilisation des bâtiments existants à zéro carbone peut constituer une partie de la réponse, mais les limites techniques du patrimoine que la requalification ne peut pas totalement résoudre, demeurent.

Si le logement social d’aujourd’hui se maintient dans ses généreuses surfaces habitables des années 70, le logement s’est néanmoins transformé dans ses organisations et ses surfaces. La règlementation sur l’accessibilité PMR a supprimé l’entrée et la distribution du logement, et intégré la cuisine dans le séjour. Devenu l’espace polyfonctionnel central du logement, on accède au séjour directement depuis le palier, on y prépare le repas et on y mange, on y reçoit et on y regarde la télé, on y joue quand les chambres sont trop petites. On y a vécu confinés avec le Covid, et aujourd’hui on y télé-travaille. Les usages ont augmenté tandis que les surfaces ont diminué. 

Le prolongement extérieur du logement constituera bientôt un incontournable. Balcons, loggias, terrasses sont-ils appelés à proliférer dans les programmes de logements sociaux, quand on sait l’investissement qu’ils représentent ? 

Les parties communes des immeubles ne pourraient-elles pas remédier aux insuffisances des logements et offrir des espaces collectifs ouverts aux ménages ? Peut-on considérer des dispositions permettant aux habitants de reprendre la main dans ces espaces, parfois rejetés ou considérés comme uniquement fonctionnels, et que les bailleurs ont du mal à entretenir ?

Comment faire évoluer le logement en parallèle des ménages y habitent ?

Les ménages, eux aussi ont évolué. Alors que les logements des années 70 accueillaient, les familles « deux parents – deux enfants » dans les T3 et T4, la taille des ménages a sensiblement diminué, passant globalement de 3 à 2 personnes par ménage en moyenne, même s’il existe aussi une demande pour des grandes familles. 

La population, en outre, vieillit et une bonne part de l’offre privée et publique ne dispose pas d’ascenseurs. L’offre, ainsi partiellement inadaptée en termes de formes et de capacité du logement, peut-elle être résolument transformée de manière pérenne, et à quel prix ?

Toutes ces questions nous assaillent dans un nouveau temps historique. De récents rapports sur la qualité du logement font des propositions. Au-delà, il semble que ce soit la chaine du logement qui est convoquée. Chaine qui assemble les territoires et l’habitat, l’économie du logement et les structures qui les portent, la maîtrise d’ouvrage et la maîtrise d’œuvre, et, plus lourdement, un nouveau modèle de construction et d’aménagement évolutif et flexible qui reste à inventer.

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¹ Rapport LEMAS sur la qualité des logements sociaux - 15 janvier 2021. Rapport de la mission sur la qualité du logement - Laurent GIROMETTI – François LECLERCQ – Septembre 2021.


Article publié le 23/05/2022

 

Photo de l'auteur Gérard LE BIHAN

Cet article a été rédigé par

Gérard LE BIHAN

Architecte – Consultant en maîtrise d’ouvrage urbaniste et programmiste
Formateur AFPOLS

glb.lebihan@wanadoo.fr